Ceci est un blog par Emily Robins, stagiaire en diététique, Grand River Hospital – Kitchener, ON
Au cours des quatre dernières semaines, j’ai eu la chance de faire un stage sous la supervision de June Martin, diététiste à l’œuvre auprès des patients en néphrologie du Grand River Hospital Dans l’unité d’hémodialyse, où j’ai passé la majeure partie de mon temps, j’ai évalué l’état nutritionnel des patients et leur ai fourni, au besoin, des conseils en matière d’alimentation.
Comme étudiante, j’avais appris que l’une des fonctions des reins est de débarrasser le sang du surplus de phosphore (un minéral essentiel qui se trouve naturellement dans notre nourriture, dans l’eau et dans nos corps) et de l’éliminer par l’urine. Une certaine quantité de phosphore est requise pour la croissance, le maintien et la réparation de tous les tissus tout comme pour la formation et la croissance adéquates des os. Mais pour une personne souffrant d’insuffisance rénale chronique, trop de phosphore dans le sang pendant une trop longue période peut affaiblir ses os et entraîner une accumulation de minéraux là où c’est dommageable, comme dans le cœur, les vaisseaux sanguins, les poumons, la peau et les articulations. De fortes quantités de phosphore dans le sang sont également étroitement liées aux affections et événements cardiovasculaires et même à la mort, chez des personnes souffrant ou non d’insuffisance rénale chronique1.
Bien qu’en temps normal les reins réussissent à éliminer l’excédent de phosphore dans notre sang, ce n’est pas tout à fait le cas des reins en mauvaise santé. Pour quelqu’un aux prises avec une insuffisance rénale chronique, la quantité totale de phosphore dans son sang peut dépasser la normale. L’une des meilleures façons de prévenir cela consiste à suivre un régime à basse teneur en phosphore, selon les indications de votre diététiste.
Comme étudiante, l’idée d’un régime à basse teneur en phosphore ne me paraissait pas bien compliquée. En tant que stagiaire devant dire à des personnes en chair et en os qu’ils doivent suivre un régime bien concret, j’ai appris que cela n’est pas une mince affaire.
Il y a deux sources principales de phosphore dans notre alimentation : organique et inorganique. Le phosphore organique se trouve principalement dans les aliments protéiniques, comme le poulet, le jaune d’œuf, le lait, les lentilles et les noix tandis que le phosphore inorganique fait référence aux additifs alimentaires contenant du phosphore2. Ces additifs sont utilisés dans toutes sortes de produits alimentaires, dont les pains, les céréales, les produits laitiers, les pâtes, les viandes, les fruits de mer et les fruits et légumes en conserve3 afin d’améliorer leur apparence, leur texture et leur durée de conservation4.
Bien que les aliments protéiniques d’origine animale ou végétale contiennent beaucoup de phosphore organique, notre corps ne peut absorber qu’environ 60 % du phosphore trouvé dans la nature s’il provient de source animale et moins de 40 % s’il provient de source végétale2,5. Par contre, dans le cas du phosphore inorganique se trouvant dans les additifs alimentaires, nous en absorbons presque la totalité2,5.
La nécessité d’indiquer le phosphore sur les étiquettes alimentaires
L’un des vrais défis auxquels est confrontée une personne qui doit suivre un régime à basse teneur en phosphore, c’est que ni le phosphore d’origine naturelle ni le phosphore ajouté n’est indiqué sur le Tableau de la valeur nutritive (https://www.hc-sc.gc.ca/fn-an/label-etiquet/nutrition/cons/index-fra.php). Cela crée plusieurs problèmes. D’abord, comme peu de gens savent que certains additifs alimentaires contiennent du phosphore, il se peut que les patients atteints d’insuffisance rénale chronique ingèrent de grandes quantités de phosphore sans le savoir! Ensuite, si les patients ne savent pas qu’ils consomment des aliments contenant du phosphore ajouté, on peut difficilement s’attendre à ce que ces aliments soient identifiés comme problématiques au cours d’un rendez-vous avec la diététiste; conséquemment, l’évaluation de la nutrition peut être moins exacte et les conseils risquent d’être moins bien ciblés.
Enfin, si la vérification de la liste des ingrédients pour repérer les additifs contenant du phosphore est un bon point de départ, elle peut s’avérer une tâche décourageante. Les listes d’ingrédients sont longues, les caractères sont petits et elles ne nous indiquent toujours pas la quantité de phosphore qui se trouve dans le produit alimentaire. Si un patient savait quelle quantité de phosphore – organique et inorganique – contient tel ou tel produit alimentaire, ce serait plus facile pour lui de choisir les aliments contenant du phosphore qui constituent un meilleur choix et de savoir plus clairement ce que représentent certains aliments dans leur apport quotidien total.
La vie des patients en dialyse est difficile pour de nombreuses raisons, incluant les restrictions alimentaires sévères, la perte d’appétit et le manque d’énergie, autant d’éléments qui entrent en jeu quand vient le temps de cuisiner. En ayant l’information nécessaire à portée de la main sur le lieu même où ils achètent leurs produits alimentaires, les patients pourraient plus facilement rester fidèles à leur régime. Il est difficile pour tout le monde d’éviter totalement les aliments transformés ou prêts-à-servir, mais c’est surtout le cas pour les patients en dialyse. L’indication de la quantité de phosphore sur le tableau de la valeur nutritive permettrait aux patients de choisir en toute connaissance de cause les aliments qui conviennent à leur état de santé et à leur budget.
Messages à retenir
Les autorités internationales et nationales devraient se préoccuper plus concrètement de l’indication, sur le tableau de la valeur nutritive, de la quantité de phosphore – naturel ou ajouté – que contient un produit alimentaire.
Pour l’instant, voici ce que vous pouvez faire pour limiter votre apport de phosphore :
1. Vérifiez la liste des ingrédients : faites attention à la présence du mot « phosphore » ou du groupe de lettres « phos » dans un ingrédient. Limitez la consommation de ces produits alimentaires ou évitez-les tout à fait.
2. Limitez votre consommation d’aliments transformés : non seulement renferment-ils des additifs contenant du phosphore, mais ils sont aussi souvent très riches en sel et offrent une valeur nutritive moindre qu’un régime axé sur des aliments non transformés. En fait, limiter sa consommation d’aliments transformés est une bonne règle pour tous!
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Références
1. Leon, J., Sullivan, C., & Sehgal, A. (2013). The prevalence of phosphorus containing food additives in top selling foods in grocery stores. Journal of Renal Nutrition. 23(4), 265-270. doi: 10.1053/j.jrn.2012.12.003
2. Noori, N., Sims, J., Kopple, J., Shah, A., Colman, S., Shinaberger, C., Bross, R., Mehrotra, S., Kovesdy, C., & Kalantar-Zadeh, K. (2010). Organic and inorganic dietary phosphorus and its management in chronic kidney disease. Iranian Journal of Kidney Diseases. 4(2), 89-100.
3. International Food Additives Council. (2015). Phosphates. Retrieved from: https://www.foodadditives.org/phosphates/phosphates_used_in_food.html
4. Benini, O., D’Alessandro, C., Gianfaldoni, D., & Cupisti, A. (2011). Extra phosphate load from food additives in commonly eaten foods: a real and insidious danger for renal patients. Journal of Renal Nutrition. 21(4), 303-308. doi:10.1053/j.jrn.2010.06.021
5. D’Alessandro, C., Piccoli, G., & Cupisti, A. (2015). The “phosphorus pyramid”: a visual tool for dietary phosphate management in dialysis and CKD patients. BMC Nephrology. 16(9), 1-6. doi:10.1186/1471-2369-16-9